L’amour virtuel est-il un leurre ?

peut-on-tomber-moureuse-virtuellement

peut-on-tomber-moureuse-virtuellement

Avec la démocratisation d’internet — et des sites de rencontres —, trouver l’amour sur toile est devenu monnaie courante. Même ma grand-mère s’y met.

Pourtant, il y a une marge entre utiliser les différents médias du Net (sites de rencontres, forum, Facebook, Twitter) pour aborder un partenaire potentiel et tomber réellement et profondément amoureux de quelqu’un que nous n’avons jamais vu en 3D. (Skype ne compte pas.)

Peut-on vraiment développer des sentiments forts et réciproques à travers un écran ? Quelles sont les particularités de ce type de relation ? L’amour virtuel, une réalité ou une vaste blague ?

Des sentiments bien réels

Que l’on ne me parle plus de vraie vie VS virtuel !
(Ou je me roule par terre en tapant du poing, en criant très très fort.)

Une part de la vraie vie existe dans l’univers complexe du Net

Pour preuve, l’embauche y est en pleine expansion et l’amour aussi. Nous y passons tous un temps considérable que ce soit pour se divertir, travailler, s’informer ou encore aimer. Aujourd’hui, internet fait partie intégrante de notre quotidien.

Quand nous étudions un article wiki sur les abeilles australiennes, nous apprenons réellement. Notre cerveau chauffe et intègre. Et lors d’un débat sur le miel, nous ressortirons les informations nécessaires pour briller en société.

Pourquoi une rencontre virtuelle ne deviendrait-elle pas le moteur de sentiments réels ?

Ce mec, nous discutons avec lui tous les soirs — ou presque — via Spyke, MSN (pour les has-been), FB, Twitter ou encore par mails.

Ce mec nous rend impatientes de le lire :

  • Nous sommes heureuses quand, au milieu de ses mots, se niche une déclaration.
  • Et nous déprimons quand des obligations nous l’enlèvent pour une soirée.

Avec lui, le feeling passe, peut-être plus qu’avec quiconque.

Ce type-là compte réellement pour nous.

Lui comme nous attendons que les obligations professionnelles aient dégagées du temps pour une rencontre. La distance est le seul frein empêchant le contact les peaux.

Les sentiments ne mentent jamais.

Si vous pensez l’aimer, c’est que vous l’aimez.

Et personne n’a le droit de parler de vrai ou faux amour, du fait de la virtualité de la relation.

VOUS en êtes la SEULE juge de VOS émotions.

Des relations très complices

Certes, sur les sites spécialisés la rencontre se base sur une présélection de critères (âge, ville, goûts musicaux, orthographes). Mais -même dans ce cadre – le feeling est toujours une affaire de hasard. Comme l’amour.

Viennent le premier coup de cœur (réciproque, on s’entend) et les longues soirées à échanger sur soi, sa vie, son regard sur le monde. Les relations virtuelles forcent à une communication que l’on peut oublier — au profit des écrans, ironie du sort — avec un partenaire bien réel.

Parler est la seule activité que permet la distance.

Avant toute liaison sexuelle, nous laissons entrevoir une part de son intériorité et, donc, de sa vulnérabilité. On communique sur ses ressentis, ses goûts, ses états d’âme.

La sensation de proximité intellectuelle s’accentue, jusqu’à dépasser largement tout ce qu’on a pu connaître avant

Je me souviens d’une relation à — grande — distance, où le virtuel prenait le pas sur le réel dès la séparation sur le quai. Une impression de vivre de complicité différente. Voir deux relations différentes. La réelle était un corps à corps passionnel et la virtuelle un cœur à cœur complice. J’aimais les deux. Il aurait été impossible de choisir. Pourtant ce n’était — presque — pas le même homme.

Celles qui l’on vécut confirmerons : ses mots sont vos mots.
On a le sentiment de se connaître depuis toujours, bien que l’on ne se soit jamais touché. C’est ce qui fait la beauté de ces relations-là.

… basés sur un mensonge ?

L’amour en soi est un mensonge. Partons de ce postulat (qui est, finalement, une évidence).

Un autre imaginaire

Certains psys vous expliqueront que nous essayons de faire coller l’autre à l’image idéal que nous avons du Prince Charmant. Le mec aimé n’apparaît pas tel qu’il est, mais tel qu’il devrait (proche du partenaire idéal).

Et à Papa (rajouteraient certains freudiens) les cheveux en plus (rajouterais certaines Anashkiennes).

La relation virtuelle amplifie cette déformation de l’autre (au profil d’un idéal).

Le fait de ne pouvoir de voir évoluer, marcher, et bouger nous donne une image « figée » de l’autre. Nous y collons donc les attitudes idéales imaginées.

(Même Skype ne suffit pas, l’image est — généralement — un portrait à peine mobile. Note : on ne se met pas à poil sur Skype avec un inconnu. Même si on l’aime.)


Ce que nous croyons lire entre les lignes est le fruit de notre interprétation.
Nous comblons les creux, les vides et les manques du langage par des intentions propres à l’homme idéal, l’homme imaginé.

Une grosse part de cette proximité — si fortement ressentie — est, malheureusement, un leurre.
Elle est le fruit de nos attentes amoureuses.

Un soi imaginaire

À cela, ajoutez que l’espace virtuel permet présenter uniquement les parties les plus glorifiantes de soi. Et, même quand nous laisserons entre-apercevoir nos failles, les descriptions que nous en faisons leur donneront la teinte gris clair de la tristesse-poético-nostalgique des romantiques du XVIIe siècle.

Bref, même nos défauts apparaissent comme de gracieuses et charmantes particularités.

Pourtant nous sommes sincères ! Effectivement, c’est avec sincérité que nous présentons ce « nous » idéal. Les premiers à qui nous mentons, c’est bien nous.

Un supercombo imaginaire

D’ailleurs, si les amours virtuelles sont si fortes (et elles le sont), c’est à cause de la triple multiplication du mensonge :

  • Par ce que nous présentons à l’autre (moi idéal)
  • Qui sera encore ré-idéalisé par l’autre (vous idéal + l’idéal qu’il aimerait voir)
  • Ré-ré-idéalisé par vous à travers le retour qu’il vous en fait (moi-idéal+ idéal de ce qu’il aimerait voir + exprimé par l’idéal que nous aimerions qu’il soit)

Comme nous nous sentons particulièrement belles dans ses yeux pixelisés de ce mec ! Quel jeu de dupes !

Quelle vérité reste-t-il ? Paradoxalement, les sentiments.

En revanche, la personne à qui nous les adressons est — bien souvent — imaginaire. (Tout comme la personne que nous lui présentons : notre moi-idéal.)

Le choc de la rencontre réelle

amour virtuel schèma

Nous voyons, sur le magnifique schéma ci-dessus (le premier qui se moque, je le fouette), la particularité de la relation virtuelle.

Il y a deux rencontres consécutives :

  • la première passe par le virtuel
  • la seconde est la confrontation réelle.

C’est la rencontre IRL qui va venir ternir l’image de l’idylle.
L’autre devient physique, odeur, bruit de mastication. Il prend sa place dans l’espace. Entre la réalité du type en face et le mec imaginaire (celui que nous aimons), l’écart est marqué, voir déchiré.

Une bombe à eau qui éclate.

Dans le meilleur des cas, la confrontation physique s’est faite rapidemment. Le rêve n’a pas eu le temps de prendre corps, et l’autre nous plaît tout de même (et réciproquement).

Autrement, la désillusion est profonde.
Il faudra tout un temps pour se défaire de la chimère que nous avions. Comprendre que l’homme que nous aimions n’a jamais existé — et n’existe peut-être pas — est d’une violence inouïe.

Pire, voir ce mec désillusionné par notre réalité déchire notre Ego.
Décevoir quelqu’un par ce que l’on fait est terrible.
Décevoir quelqu’un part ce que l’on est, est à la limite du supportable.

Il y a un véritable double deuil à faire.

  • Celui du mec aimé
  • Celui de la femme que nous percevions dans ses yeux.

Certains tenteront de construire, malgré tout, une relation.
Ils perdront définitivement de l’être virtuel. Mais ils gagneront — peut-être — un amour réel, avec ses ennuis, ses flatulences dans le lit, ses égoïsmes, et ses reproches…

Mais finalement, à quoi bon aimer ses rêves, si c’est pour n’aimer personne ?


Et vous, avez-vous déjà vécu un amour virtuel ? Pensez-vous qu’il puisse survivre à la seconde rencontre ?

Anashka,
Si tu es Anashkienne, tape dans tes mains !
(Pour me retrouver sur Facebook, c’est ici)