Doit-on être prudent en Amour ?

4 conseils pour le début d'une relation amoureuse

doit-on-etre-prudent-en-amour
Pour la première fois depuis que je suis ici, je ne sais pas comment faire mon introduction. Je l’écris, l’efface, l’écris. Elle est un Coming Out, pour moi.Un partage de quelque chose de relativement personnel. Un aveu. J’espère que vous me le pardonnerez.

 

Coming Out

Je ne suis pas prudente en Amour. Autrement dit, je n’écoute pas la plupart de mes conseils.

Quand j’aime, je ne réfléchis pas une seconde pour savoir si le gars est fait pour moi ou pas. Je sens un truc, je fonce. Je ne tente pas de le faire tomber amoureux. Je n’applique pas de techniques. Je fais les choses comme elles viennent.

Alors, dans le lot, je me casse la gueule, je fais des sacrifices, j’ai des ailes dans le dos, je me mange des murs, je souris comme une conne, je souffre.

  • Suis-je en train de dire que mes conseils sont mauvais ?

Non. La plupart tiennent du bon sens et je me les recommanderais.

 

  • Pourquoi est-ce que je ne les suis pas ?

 

 

Parce que je me pose, sincèrement, la question de la place de la prudence et du bon sens dans l’Amour que JE veux vivre. Et, que force est de constater que POUR MOI, je ne tiens pas particulièrement à être sage !

(Ça m’ennuie, à dire vrai. Il possible que je sois une adolescente attardée. )

Voilà, tout un article pour questionner cette notion de prudence dans l’Amour. Ainsi, avec le même éclairage que moi, vous choisirez pour VOUS :

  • la relation que vous désirez
  • la dose de prudence que vous tenez à mettre
  • la souffrance que vous êtes prête à endurer (souvent inversement proportionnel à la dose de prudence que vous tenez à y mettre).

Enjoy.

 

L’Amour fait souffrir

C’est un constat. Interrogeons nos pairs, tout le monde a déjà souffert à cause de l’Amour.

Que ce soit :

    • pendant la solitude du célibat (le dimanche soir, quand il pleut)
    • pendant que nous nous obsédons sans aucun retour de l’être aimé.
    • Pendant l’angoisse des premiers temps (où l’on ne sait pas trop si l’on aime à tort ou raison)
    • pendant la dépression postrupture (où la camomille devient notre meilleure amie)

La souffrance en Amour a longtemps été félicitée (notamment avec l’arrivée de l’Amour romantique dans la littérature). Par la suite, les livres à l’eau de rose, les films hollywoodiens nous le confirment : plus nous souffrons, plus nous aimons.

Heureusement, de nombreux auteurs, auxquels je me joins, démantèlent cette association dangereuse.
Souffrir ne veut pas dire aimer. Souffrir, ça veut dire souffrir. Toutes les histoires ne sont pas synonymes de souffrance et l’on peut se remettre facilement d’une rupture avec quelqu’un que l’on a aimé.

Autrement dit, la souffrance n’est pas une preuve d’Amour.

En revanche, ce n’est pas parce que la souffrance n’est pas OBLIGATOIRE dans l’Amour que l’Amour DOIT systématiquement être indolore.

On peut aimer vraiment et ne pas souffrir. Aimer vraiment et souffrir vraiment. Ne pas vraiment aimer et souffrir quand même. (Là, c’est un poil emm*rdant)

Dans tous les cas, je ne pense pas que chercher uniquement un Amour indolore soit un bon moyen de ne pas souffrir. (La déception, c’est de la souffrance.) Et que chercher la souffrance permette de trouver un Amour fort.

 

La douleur est perçue comme inconcevable

Nous le savons. Nous, enfants d’un occident confortable et engraissé, nous ne connaissons pas la douleur. Nous n’avons vécu ni la guerre, ni la faim, ni le froid. Très peu d’entre nous passeront par la case « à la rue » (et c’est tant mieux). Nous ne sommes que très peu confrontés à la misère ou à la mort (nous emportons nos mourants dans les maisons de retraite ou les hôpitaux).

Au final, nous avons une vie où la douleur n’a pas sa place.
Quand physiquement nous souffrons, on nous soutient à grands coups de morphine, d’habits blancs et de sourires polis.

C’est peut-être pour cela que la souffrance nous paraît inconcevable, évitable, invivable. Nous ne la traversons que très peu.

La douleur amoureuse devient d’autant plus lancinante que c’est une des premières, plus importante, et plus répétitive que nous traversons. Nous n’avons pas l’habitude. Forcément, ça prend de la place. Forcément, ça nous révolte. Car la souffrance est vécue comme anti-naturelle.

Alors que non seulement la douleur est monnaie courante pour beaucoup d’êtres humains, mais elle est source d’apprentissage. Pour souffrir, il faut être bien vivant.

C’est le rappel que nous fait la douleur : nous vivons et cet état est pérenne.

La douleur est inhérente à la vie, elle est l’appel de phare qui nous prévient : personne n’a promis que la vie était belle ou juste.

 

La prudence en Amour est recommandée

Parce que si nous ne sommes pas prudentes, OMFG (Oh My F*cking God), nous pourrions éprouver de la douleur !

Vous trouverez une tonne de personnes bien intentionnées qui vous expliqueront comment se protéger de la souffrance amoureuse. Vos parents sont, souvent, de la partie. Viennent, ensuite, tous les professionnels du domaine amoureux :

  • psychologues en tout genre
  • experts en développement personnel
  • journalistes en presse féminine
  • coach de séduction (comme votre serviteuse)

Qui, il faut bien le dire, vivent de votre souffrance (ou peur de la souffrance).

Par prudence, nous inventons de nouveaux modèles amoureux.

Fini le couple passionné Shakespearien qui s’aime jusqu’à la mort (les morts, ça ne paye pas un avocat pendant un divorce). Bienvenue couple moderne où chacune des individualités prime sur le duo!

(Je ne dis pas que c’est bien ou mal, hein. Je ne juge pas. Et, perso, mourir par Amour, OK, mais de mort lente).

 

Entraînant une aseptisation des relations

Alors, pour ne pas souffrir, on essaie de déterminer comment reconnaître le bon / la bonne. Nous redessinons collectivement un portrait-robot du partenaire idéal (beau, ambitieux, généreux, sportif, intelligent, fidèle, indépendant, féministe, cultivé…).

Forcément, il est impossible d’atteindre l’idéal de l’autre sexe ou de trouver quelqu’un qui ressemble à ce portrait-robot (à moins de projeter sur l’autre des qualités qu’il n’a pas).

De même, nous inventons ce que devrait être une relation idéale :

  • bon poids de sentiments
  • degré suffisant de communication
  • taux d’indépendance moyen
  • bon degré de complicité
  • bon rapport quantité/qualité de sexualité
  • bon taux de proximité. (Mais point trop n’en faut, au risque d’être classé comme « couple fusionnel », donc « couple qui va OBLIGATOIREMENT m*rdé »).

Enfin, il faut être sûr que l’autre nous aime pour l’aimer. Ça pourrait faire mal sinon. Puis, c’est bien connu, rien n’est gratuit. Pourquoi en serait-il autrement des sentiments ?

Bienvenue dans la méritocratie amoureuse !

Aimer, être aimée se mérite. Il faut :

    • 1. Devenir le partenaire idéal (pour cela, les livres sur l’estime de soi sont fort à propos, ainsi que les conseils pour maigrir)
    • 2. Trouver sa moitié d’orange (« Elle », « Biba » et « Psychologie magazine » vous diront de qui il s’agit)
    • 3. Être sur qu’on s’attire/s’aime autant (un bon coach, vous dira tout ce qu’il faut savoir).
    • 4. Construire une relation saine (instructions au rayon chambre à coucher chez Ikéa).
    • 5. Si ça ne marche pas, les psychologues sont là pour vous ! ;)

 

C’est le couple moderne.

Je crois qu’on a quitté une norme (patriarcale, injuste) pour en créer une autre (bien qu’elle me semble meilleure pour les femmes, elle reste une norme qui ne nous rend pas particulièrement heureuses.) Bien sûr, tout cela c’est pour notre bien, pour ne pas souffrir.

 

Pourtant, nous souffrons toujours

La dépression est le mal du siècle. (Pour le plus grand bonheur des sociétés pharmaceutique qui nous gave de pilule du bonheur. Je préfère ma camomille.)

D’ici une dizaine d’années, la dépression sera devenue la première cause d’arrêt maladie avant les AVC et cancers (pourtant, eux aussi se multiplient).

Quand j’étudiais la psychologie, la dépression était perçue comme la pire maladie de l’esprit, la plus grave et importante. La dépression, c’est notre psychisme qui se laisse mourir.

Entre chute d’estime de soi (à ne pas parvenir à atteindre les modèles actuels, à ne pas se chercher ailleurs), perte de sens de la vie (à ne plus s’y cogner, on passe à côté), isolement (ou « individualisme »), perte de valeurs (ou changement de valeur vers l’ambition et LA réussite sociale prédessinée pour nous)… nous sommes perdues. Nous vivons un véritable désamour de soi.

Incapable de ressembler aux publicités pour les barbecues et incapable de cesser d’y tendre. Nous sommes écartelées par des idéaux fades qui nous éloigne toujours plus de notre « noyau », de notre « moi profond » (si nous en avons un. J’espère…). Alors, à ne pas trouver sa place, nous déprimons.

Même si nous atteignons l’idéal (bravo!) le bonheur promis n’est pas aux rendez-vous. Perte de sens encore et toujours.

À avoir peur de souffrir, à éviter les risques (de la marginalisation, de suivre SA propre route), on se perd… Et on souffre. Autrement, j’en conviens.

 

Aimer c’est prendre des risques

(Comme vivre d’ailleurs.)

En Amour, nous prenons de plus en plus des décisions de raisons. Elles visent à moins souffrir. Pourtant, il semblerait que nous perdons au fil des années (et des choix de raisons) notre joie naïve face aux sentiments éprouvés, face à la rencontre. Nous nous méfions plus, nous pardonnons moins, nous réfléchissons à ce qui ‘à terme‘ nous fera le moins de mal.
Nous sommes des peureuses de l’Amour (et de la vie).

Cette peur est accentuée par une société qui nous prémâche des images de bonheur et d’amour et qui nous explique comment faire pour les atteindre. Alors que le bonheur comme l’amour sont bien moins « naturels » que la rencontre avec la douleur. À trop les chercher, à tenter de prendre le chemin le plus prudent, nous prenons toutes la même autoroute de conformité et de dépression. Nous perdons nos différences, nos hasards et nos richesses.

Dire que l’on peut faire des « erreurs » en amour, c’est admettre la douleur comme erreur. Alors qu’elle n’est qu’une expérience parmi d’autres. D’ailleurs, quand nous cessons de la craindre nous avons des actions folles (folie : sortir du sillon) et nous nous retrouvons sur des chemins farfelus, très peu empruntés par d’autres. À défaut d’être heureuses, nous nous sentons vivantes.

Je ne sais pas ce que c’est l’Amour. Hormone ? Instincts de reproduction ? Construction sociale ?

Je ne sais pas non plus ce qu’est le bonheur. Je sais simplement qu’il n’y a pas une route, une manière de vivre idéale. Il y a des normes que nous pouvons choisir de suivre ou pas. L’important reste encore et toujours d’être en accord avec ses choix, même s’ils vont à contre-courant.

Le risque, en Amour, c’est souvent tenter l’inédit. Tenter autre chose. Si ça ne marche pas, tant pis. Ce n’est pas si grave, nous surmonterons bien une douleur amoureuse.
Le plus grand des risques, au final, c’est de faire de la peur notre seule conseillère.

 

Et vous, qu’elle est la plus grosse folie que vous ayez faite par Amour (par goût de la vie) ?

Anashka,

partir en stop sur les routes de France