Déceptions amoureuses : la faute aux projections ?

déception-amoureuse-faute-projection

déception-amoureuse-faute-projectionDans de nombreux articles ou commentaires, je reviens sur ce terme « projection ». (En ajoutant « Calm Dowm ».)

Une projection est une attente consciente (ou non) sur une situation donnée. (« S’il m’aime, il ne couchera pas avec une autre femme »). Les projections sont la résultante d’une interprétation de la réalité par le biais de nos attentes et non un regard objectif sur celle-ci.

Si je souffre autant de cette rupture, c’est qu’il est l’homme de ma vie. » L’attente étant de rencontrer quelqu’un avec qui faire sa vie et de vouloir que cette personne soit cet ex et qu’il revienne. Objectivement, cet homme est un ex. La relation n’a plus lieu. Donc, il y a peu de chances que l’on fasse notre vie avec. Et encore moins qu’il symbolise l’homme d’une vie. )

Les projections sont un étrange mélange entre nos attentes, espérances, névroses (Œdipe) , de notre conditionnement, mais aussi de ce regard que nous avons décidé de poser sur les choses. Quand elles sont sentimentales (« Je ne peux pas vivre sans lui »), elles peuvent faire l’effet de dangereuses prophéties auto-réalisatrices ! (Le cas échéant, se laisser glisser vers une dépression à tendance suicidaire suite à une rupture.)

Je me demande si les projections ne sont pas coupables de la plupart de nos déceptions et déconvenues amoureuses : « Nous avons imaginé que… mais il se trouve que… ». L’illusion, c’est la projection. Et, rien n’est plus difficile qu’enterrer une illusion.

Bref, un topo sur les projections et leurs fonctionnements, c’est ici.
Enjoy

Les projections sur le couple

Alors qu’il existe de nombreuses configurations de relations amoureuses, nous visons généralement le « couple ». .

Avant même de vivre notre première histoire, nous avons déjà une idée de ce que nous voulons : engagement, confiance, passion, complicité, etc. Nous avons donc un schéma de ce que doit être un « couple ».

Ce schéma se construit via les valeurs de notre société .

En France, le couple est une entité « monogame » qui se construit sur « l’amour ». Ce n’est pas valable dans tous les pays. De nombreux mariages arrangés reposent uniquement sur la construction de la famille (et non sur les éventuels sentiments). Quant à la monogamie, elle est loin d’être universelle.

Pour voir quelles sont les valeurs sur le couple défendues par une société, on peut regarder comment sont décrites les rencontres dans les films.

(Nous, on retrouve : coup de cœur ( la fille est belle) => quelques péripéties => baiser / sexe => l’un déçoit l’autre => ils se retrouvent et sont contents.)

Ce schéma se construit sur les normes de genre en vigueur

Dans une époque comme la nôtre, on pourrait (encore) imaginer : « Maman est / doit être douce. Papa est / doit être fort. » Donc, dans notre schéma amoureux, nous attendrons que l’autre nous apporte sa force / protection et de nous, que nous ayons le rôle de douceur, patience. La caricature est volontaire et nous pouvons avoir intégré les normes de genre de manière plus « light ».

Note : les schémas de genre (de notre société) peuvent permettre une répartition des rôles qui conviennent à certains alors que d’autres peuvent s’y sentir à l’étroit. (Pour ma part, je me refuse à être la patiente / douce / compréhensive du couple. J’ai une tendance à la Buldozer attitude.)

Note : il n’existe pas de société sans normes de genre ! C’est impossible. La différenciation des sexes est nécessairement pensée d’une manière ou d’une autre. (Que la société soit matriarcale, patriarcale, imbéciliarcale…)

Ce schéma se construit sur les « imago parentaux »

Imagos parentaux : représentations inconscientes que nous avons de nos parents (et de leur couple). (Je vais légèrement caricaturer le concept, mais j’y reviendrais dans d’autres articles. )

Mes parents parlaient beaucoup. Après le repas du midi, le week-end, ils prenaient ensemble un café et discutaient une ou deux heures de leur relation, travail, enfants, gestion des amitiés. Il faut croire que j’ai intégré ce schéma fortement, car s’il n’y a pas ce dialogue avec mon mec, je ne me sens pas « avec lui » (magrès le sexe, la tendresse, les mots doux…).

De même, on peut avoir des parents peu démonstratifs et être mal à l’aise avec les grandes déclarations de notre conjoint. On peut avoir grandi dans un climat de conflit et aimer la dispute pour décanter une situation. Etc.

Comprenez votre regard sur la relation qu’entretenaient vos parents, vous comprendrez beaucoup de votre recherche amoureuse. (C’est Papa Freud qu’est content, quand j’dis ça.)

Problématique des projections sur le couple

Nous avons donc un schéma de ce que « doit être un couple ». Quand nous rencontrons quelqu’un, il n’est pas rare de projeter ce schéma sur le nouveau visage.

Quand j’étais ado, j’aimais les mauvais garçons. Pour moi le couple, c’était une déchirure mutuelle et consentie (Twilight-schéma). J’appelais ça « passion ». C’était mon schéma amoureux. J’vous dis pas comme j’me suis déchirée avec mon premier amour (un punk, un tatoué, avec des chiens et tout le bordel). J’ai vécu un peu de ma projection.

Le problème, c’est que les schémas pré-fabriqués ne correspondent pas à la réalité de ce que nous vivons avec l’autre. Dans mon cas, on se déchirait, mais il n’y avait rien de « mutuellement consentie ». On tente de faire rentrer l’autre dans nos rêveries. Et, la déception finit par pointer son nez.

L’OI est un autre problème de la projection sur le couple.
Premier regard et la machine s’enclenche : va-t-on vivre ce que l’on attend ? Va-t-on aller vers « ce couple » que l’on attend ? Et, s’emballer, attendre de l’autre, c’est s’enfermer dans des espoirs parfois vains.

Les projections sur l’amour

Les projections sur l’amour sont inter-liées aux projections sur le couple. Nous l’avons dit, dans notre société et époque, on entre en couple par « amour ». C’est la condition de sa construction. Donc, on retrouve les mêmes schémas que plus haut.

J’ajouterais que le « je t’aime » ne veut pas toujours dire la même chose pour deux partenaires. (J’ai fait un article sur la définition des mots d’amour, il n’y a pas si longtemps. J’vous invite à aller le lire ! )

Tu ne m’aimes pas autant que je t’aime !

Prenons un couple. Un couple qui s’aime. Mais qui ne met pas du tout la même chose derrière le mot « aimer ».

Pour elle, « aimer », c’est comme une cerise sur le gâteau. Elle est heureuse, elle trouve la vie jolie. Mais depuis qu’il est là, il vient y ajouter un petit quelque chose qui rend sa vie meilleure.

Pour lui, « aimer », c’est refuser de bouffer le gâteau si elle n’est pas là. Dans son absence, tout devient gris et fade. Sa chérie n’est pas la cerise sur un gâteau, mais l’envie même de manger le-dit gâteau. (Si, toi aussi tu rêve d’un cheesecake, à ce moment précis, tape dans tes mains. )

Typiquement, quand ils s’appelleront, elle lui dira : « j’ai passé une très belle journée », heureuse de lui partager. Il entendra : « je suis heureuse sans toi ».

Si lui appelle, il dira : « tu me manques, je m’ennuie de toi ». Elle entendra : « tu n’es pas assez présente, tu ne me rends pas heureux ».

Alors, réciproquement, ils auront le sentiment de ne pas être aimé. Et, il est vrai qu’il ne s’aime pas de la même manière… Il faudra s’arrêter sur SA définition de l’amour et celle de l’autre, pour se rendre compte qu’on parle tout de même de la même chose : un regard tourné vers l’autre.


Trois articles pour réfléchir sur notre conception de l’amour :

Les projections sur l’autre

Jacques Salomé, mon nouveau maître à penser sur l’amour, explique qu’une grande partie des déconvenues du couple vient des projections que nous formons sur l’autre en début de relation.

Rencontre et « soi’ »

Sylvie rencontre Thomas. Ils se plaisent et commencent une jolie histoire de cœur. Mais ce que Sylvie voit de Thomas quand elle en tombe amoureuse n’est pas exactement le « vrai » Thomas, mais la projection qu’elle a sur lui, en tant que partenaire. Ces défauts sont gommés, minimisés et l’envie de le comprendre de faire corps avec lui demande à étouffer les différences.

Parallèlement, Thomas ne présentera pas son « vrai » soi. Il se fera nécessairement plus conciliant, patient, à l’écoute (ou fort, viril et tout le bordel) pour plaire à Sylvie.

Combien de fois, parce qu’amoureuse, nous nous sommes montrées plus apprêtées qu’à l’accoutumée, plus drôle, douce ou spirituelle ? En début de relation, nous voulons être aimé de l’autre, alors nous lui présentons le meilleur de soi. (Qu’on appelle « idéal de soi »)

Résultat, ce que Sylvie voit de Thomas, c’est un mélange : des projections qu’elle a sur lui, de « l’idéal de soi » que lui offre à voir Thomas et du « vrai » Thomas. Jacques Salomé parle de « Thomas’ ».
De même, Thomas a sous les yeux « Sylvie’ », pas la « vraie » Sylvie.

Désidéalisation

Bien sûr, avec les années et la vie commune, ce « ‘ » est rongé par la réalité de l’autre. Et, on arrive à s’entendre dire : « tu ne me connais pas ! » « Tu ne m’aimes pas vraiment pour ce que je suis » ou « je ne veux plus exister dans ton regard »… Autrement dit, « je ne veux plus être « moi’ » »

On peut avoir le sentiment de ne pas avoir d’existence propre. D’être soumis à ce « ‘ » et finalement, d’être peut-être passé à côté de l’amour et de soi.

Projections, en bref

Les projections, vous le devinez, sont le lieu de nombreuses déceptions. Il me semble d’ailleurs impossible d’avoir une déception sans projection.

C’est parce qu’on a imaginé que l’autre était fidèle, que l’on est déçue d’une passade. C’est parce qu’on a imaginé qu’on plaisait à l’autre, que le râteau est violent. C’est parce qu’on a imaginé que la signification de l’amour était identique pour notre compagnon et nous, que l’incompréhension nous blesse tant…

Mais, faut-il pour autant abandonner toutes projections ?

(Déjà, pouvons-nous ?)

A mon sens, il n’y a pas d’amour sans idéalisme.

Il n’y a pas de relation, sans un peu de rêve. L’amour existe seulement parce qu’on y croit. L’amour EST projection. L’amour EST une invention.
(Ou s’il existe quelque chose par delà les projections, c’est bien plus mystérieux que les Pyramides, l’Atlantide, les cristaux, la recette de lasagne de ma mère).

Notre amour pour l’autre EST projection.

Alors, je pense que le cheminement amoureux se fait entre projections et retour sur terre.

 

  • Il faut le temps de l’ivresse, des projections en pagaille, des envies d’absolu et de ce semblant de fusion. Il faut le temps de l’insouciance.
    Car c’est ce Cupidon jeune et naïf, qui offre les premiers mots d’amour dans une relation, fussent-ils des mensonges, ils nous offrent l’envie de marcher ensemble.
    (Sans projections, sans rêveries amoureuses et avec les possibilités de famille monoparentale, je ne pense pas qu’on s’emmerderait la vie avec le couple. L’amour est transcendantal ou n’est pas).

 

 

  • Puis, il faut un temps pour séparer nos projections de la réalité effective, se laisser décevoir sans violence. C’est la perte des idéaux.
    C’est la gueule de bois de notre Cupidon. C’est la colère contre soi de s’être trompé à ce point sur l’autre. Mais, laisser crever l’idéal, me semble le seul moyen pour aimer l’autre pour lui-même et pour exister pour soi (même si l’on fracasse l’image positive que l’autre avait de nous).
    Pour que naisse la seconde rencontre, il faut que la première s’éteigne.
    Triste ? Poétique ? Mais, tellement plus vrai.

 

 

  • Enfin, il faut un temps pour inventer de nouvelles projections. Pour ré-idéalisé la réalité dans un regard commun. Un amour sans idéalisation (donc sans mystère, sans « inquiétante étrangeté ») est plus fade que les épinards à la crème de la cantine.
    Et, ce travail de second coup de foudre (d’un Cupidon mature qui a appris à tirer à l’arc) s’il est semé de doutes et d’embûches, me semble ouvrir sur une « réinvention de l’amour » comme nous conseillait Rimbaud…
    Et, j’vous dirais dans quelques années à quoi ça peut bien ressembler. (Pour moi, en tout cas).

 

« Il est, parait-il, des terres brulées donnant plus de blés qu’un meilleur Avril ».
Et vous, quelles projections avez-vous abandonné pour embrasser plus sincèrement l’autre ?


A abandonné la monogamie
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